Horoya AC: Lamine Ndiaye dit ses vérités à Augustin Senghor et Cie

coach Lamine Ndiaye

coach Lamine Ndiaye

L’entraîneur sénégalais du club guinéen de Horoya, Lamine Ndiaye, pourra désormais s’asseoir sur le banc lors des prochains matches de son équipe en compétitions africaines. Depuis près d’un an et demi, le technicien sénégalais, vainqueur de la Ligue des champions avec le TP Mazembe, en était privé pour absence de licence A.

L’histoire commence par de nouvelles règles imposées par la Confédération africaine de football (CAF), qui exige désormais la licence CAF A ou la licence UEFA Pro pour s’asseoir sur le banc dans les compétitions africaines. Lamine Ndiaye, qui ne possède que la Licence A UEFA, ne peut-être pas sur le banc de Horoya malgré son expérience et son palmarès en Afrique, avec notamment sur son CV une Ligue des champions CAF, une Super Coupe CAF et une place de finaliste lors de la Coupe du monde des clubs en 2010.

L’ancien sélectionneur des Lions du Sénégal est circonspect, encore plus quand la Fédération sénégalaise de football « oublie » de le mettre dans la liste des entraîneurs à qui elle octroie la fameuse licence. Ndiaye devra donc passer par la France pour obtenir le Brevet d’Entraîneur Professionnel de Football (BEPF) grâce à une Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) et ainsi décrocher le fameux sésame. Ouf !

Lamine Ndiaye, plus de vingt ans comme entraîneur en Afrique mais vous avez dû retourner un peu à l’école pour pouvoir vous asseoir sur un banc pendant les compétitions africaines…

Oui, il n’y avait pas d’autre solution, je devais solliciter une VAE. Cela a duré 5 mois, heureusement que j’ai été accompagné d’un expert en développement de projets sportifs à l’international, M. Hugo Sanudo. Cela m’a permis de revoir des amis et de replonger dans le bain. C’était une sorte de révision, je devais restituer l’expérience que j’ai eue durant mes plus de 25 ans de carrière. De toute façon quand tu es entraîneur, il faut toujours rester au diapason pour ne pas être largué. Le foot va tellement vite.

Ce diplôme vous le ressentez comme quelque chose qui va vous ouvrir d’autres portes ou une simple façon de vous mettre en règle avec les exigences de la CAF ?

C’est surtout pour me mettre en règle avec ce qui a été demandé en sachant que les gens de la CAF ont un peu exagéré. Dans toute règle, il y a des exceptions. Quand quelqu’un joue une compétition (NDLR : la Ligue des champions africaine), qu’il gagne cette compétition et atteint plusieurs fois les demi-finales, il est logique de penser que cette personne a les compétences requises pour officier à ce niveau. Ils sont allés un peu trop loin je trouve. Si j’avais su, il y a 20 ans, qu’on me demanderait cela en Afrique, je l’aurai fait naturellement. Le paradoxe, c’est qu’il y a pas mal d’entraîneurs aujourd’hui sur les bancs africains, que j’ai moi-même formés. J’en ai formé au Cameroun, au Congo…

Comment avez-vous vécu cette « privation » ?

Se retrouver privé de banc du jour au lendemain, c’est déroutant. Il faut savoir aussi que si je voulais passer la licence A de la CAF, il aurait fallu que je reprenne tout à zéro. Vous vous rendez compte ? C’est bien louable de vouloir harmoniser comme en Europe où le diplôme espagnol te permet par exemple d’entraîner en France, mais il faut le dire, on est trop en déficit en Afrique aujourd’hui concernant la formation. Les directeurs techniques nationaux ne forment pas les gens alors que cela fait partie de leurs prérogatives. Si tu veux te développer, il faut former les formateurs d’abord.

On vous sent encore amer, vexé ?

Pas du tout. Cela m’a surpris, c’est vrai. Ce qui est encore pire, c’est quand on te dit que tu ne peux pas aller sur le banc, mais que quelqu’un, qui n’a aucun diplôme, peut y aller. J’aimerais bien qu’on m’explique. Par exemple, pendant ces 20 mois, celui qui était sur le banc de Hotoya pendant les compétitions africaines, c’est un de mes adjoints et il avait une licence C. Comment cela est-il possible ? Je ne sais pas qui a réfléchi à ce schéma, mais la CAF aurait pu mûrir cette réflexion. Il y a tellement de non-sens là-dedans. Elle risque de se prendre à son propre jeu.

Vous auriez pu passer aussi par la Fédération sénégalaise pour obtenir cette licence…
La Fédération sénégalaise a organisé une session pour délivrer la licence à des entraîneurs du pays sans que je n’en sois informé ni contacté. La Fédération sait bien où me trouver, elle sait où j’entraîne. Il y a beaucoup de fédérations qui ont juste contacté leurs ressortissants pour leur dire : « Venez, votre diplôme vous attend ». Ils savent qu’ils ont les compétences. Moi, ma Fédération ne m’a pas contacté, je suis donc reparti là où j’avais passé mes diplômes, en France. Je ne sais pas si c’est fait sciemment, mais en tout cas, c’est maladroit. Aujourd’hui, je n’ai aucune relation avec les autorités du foot sénégalais.
RFI