Cheikh, le père de Pape Gueye raconte son fils : son enfance, les clubs qui voulaient le gamin, le banditisme dans son quartier, il dit tout

Âgé de 23 ans, Pape Alassane Gueye fait par tie des révélations de la Coupe d’Afrique des nations (Can) remportée par le Sénégal. Ce milieu de terrain qui a séduit les sénégalais par son talent, a une histoire singulière racontée ici par son papa, Cheikh Gueye. Qui a eu l’amabilité d’ouvrir ses portes à L’Observateur pour mieux faire connaître son fils.

Léona, village de Pape Gueye aux couleurs de la nation

Ce mercredi 9 février, Léona, chef-lieu de commune dans le département de Louga, est en fête. Sa place publique est prise d’assaut par une foule en liesse. Les habitants de cette localité ont affiché la bonne mine, continuant de savourer la belle victoire de l’équipe nationale de football, sacrée cham pionne d’Afrique de la 33e Can. Alors, pour mieux coller à l’évènement, presque toutes les maisons étaient drapées des couleurs nationales. Celle de Cheikh Gueye, un Emigré vivant en France, n’est pas en reste. L’imposant bâtiment où il vit, trône majestueusement en face de la route de Potou à un jet de pierres de la mairie.

Le grand portail fait en fer forgé don nant directement sur la cour est surplombé du drapeau tri colore. Même le véhicule de type 4X4 de couleur noire, stationné dans le parking, n’a pas été oublié. Le drapeau national flotte à son intérieur. Dans la véranda, une grande photo de l’international Pape Guèye est accrochée au mur. Le maître des lieux, Cheikh Guèye qui suivait avec attention la décoration des Lions à l’ordre national du Lion par le président de la République, est assis sur un matelas. Les yeux rivés sur le petit écran. Habillé d’un pantalon bouffant et d’un sous-vêtement de couleur blanche, cet homme, âgé d’une soixantaine d’années, ne peut rester indifférent à cette rencontre qui se tenait mardi dernier au palais. Son fils, Pape Alassane Guèye, plus connu sous diminutif de Pape Gueye, fait partie de la bande à Sadio Mané qui recevait les honneurs de la République, après le sacre à la Coupe d’Afrique des nations à Yaoundé au Cameroun devant l’Egypte. Visiblement fier, l’heureux papa piaffe d’impatience de retracer le parcours glorieux de son enfant, entré à jamais dans l’histoire de la plus belle des manières.

Astou Diouf, le nom de sa mère

Même si Pape Guèye est né le 24 juin 1999, l’année 1985 reste une date repère pour lui. En effet, c’est durant cette année que son père a déposé ses baluchons en France. A l’époque, le jeune homme, la tête farcie de rêves, à l’image de ses camarades d’âge, avait opté pour l’émigration dans le but faire fortune à «l’Eldorado». Dès que l’occasion s’est présentée à lui, Cheikh Guèye qui vivait à l’époque à Dakar, l’a saisie. Une fois en France, l’émigré, s’installe dans la banlieue pari sienne, notamment à Blanc-Mesnil (dans le département de Seine-Saint-Denis, en région Ile de France, Ndlr) où la vie est moins chère. Exerçant le métier de tailleur, l’émigré, après avoir passé quelques années loin des siens, a rencontré sa compatriote, Astou Diouf, une habitante de la ville de Dionewar (dans l’arrondissement de Niodior, région de Fatick). Une relation amoureuse est née entre eux. Quelques mois plus tard, le mariage a été scellé entre les deux Sénégalais. De cette union est née une fratrie de trois enfants, dont un garçon, Pape Alassane Guèye, qui porte le nom de son grand-père maternel. Le garçon sera couvé par un papa protecteur à cheval sur les préceptes de l’Islam et une maman très attachée à ses origines Sérères.

Le football pour l’éloigner du banditisme

A 5 ans déjà, il a commencé à fréquenter l’école maternelle. Le môme, très agité, jouait souvent des tours à ses parents pour échapper à leur vigilance. Cependant, pour éviter que son enfant ne soit en contact avec ses camarades d’âge, qui n’avaient pas bonne presse à Blanc-Mesnil, son papa l’inscrit dans un centre de sport dans le but de l’occuper. Cheikh Guèye s’en souvient comme si c’était hier: «Le banditisme régnait dans notre quartier. C’est la raison pour laquelle j’avais opté de l’amener dans un centre de sport. Il était âgé de 9 ans. Vraiment, je n’avais jamais imaginé qu’il allait devenir joueur professionnel. En réalité, j’avais misé sur les études. Chaque après-midi, je le déposais, quand j’allais au tribunal et à la descente, je passais le récupérer. Pour dire vrai, il n’avait pas de temps libre. Il alternait l’école et le centre de sport. J’ai été surpris d’apprendre qu’il avait des talents de footballeur. Je l’ai su le jour où il avait remporté le trophée de meilleur buteur à l’issue d’un tournoi pour la catégorie des 11 ans. D’ailleurs, ce sont ces rencontres sportives, qui opposaient les quartiers de la banlieue parisienne qui ont révélé ses talents. A ses 13 ans, des recruteurs envoyés par les clubs français, l’ont découvert au cours d’un match où il jouait comme milieu de terrain. Des clubs comme Nantes, Saint-Etienne, Paris FC, le Havre AC ont tous frappé à ma porte pour l’intégrer dans leur centre de formation. Après mûre réflexion et le conseil d’un ami, j’ai opté pour le Havre dont le président m’avait assuré qu’il allait faire de lui un Homme au vrai sens du terme. C’est ainsi qu’il a intégré le centre de formation du Havre où il a obtenu sa licence professionnelle à l’âge de 18 ans. C’est dans ce temple du savoir qu’il a rencontré des joueurs de renom, dont Paul Pogba. Il y est resté jusqu’à l’obtention de son Bac commercial…». La suite, on la connaît. Le jeune a révélé ses ta lents de footballeur à l’OM en France et tapé dans l’œil du sélectionneur national des Lions, Aliou Cissé. Celui qui suivait les prestations des Lions à la télé a finalement rejoint la Tanière sans être dépaysé. Il a appris à connaître les réalités du pays.

Source: L’Observateur